Ce mois-ci nous vous offrons le poème de l’auteure belge Anne Herbauts glané dans son magnifique livre « Je ne suis pas oiseau » (est-il disponible ?) aux merveilleuses images et photos, feuilletez-le c’est du pur bonheur !
Je ne suis pas un oiseau
Je ne suis pas un oiseau.
Ni miettes
Je ne suis pas un oiseau
Ni miettes
Ni nid
Ni œufs
Ni ciel
Si le ciel si
Je ne suis pas un oiseau
Je ne suis pas un oiseau
Je ne suis pas léger, menu
Ni bec ni plumes
Je ne chante pas
Je n’aime pas les arbres
Si les arbres si
Je ne suis pas un oiseau
Je ne vis pas dans les branches
Ni jungle,
Ni instinct
Ni beauté sauvage
Je n’écoute pas chanter la pluie
Si la pluie si
Je ne suis pas un oiseau
Pas d’innocence
Pas de soleil
Ni lisières
Ni piquant de l’air
Pas de peu, de rien
Non
Je ne suis pas un oiseau
Je ne suis pas un oiseau.
L’horizon n’est à personne. Il recule. Ne cesse. Rebute, découle. Les murs feront semblant qu’il n’y en n’a plus, d’horizon. Et des ciels beaux d’opéra, lambeaux, tomberont, tragiques, sur une espérance inimaginable. Des cieux miteux, des clairières vermoulues en drapés barreaux, ça ne donne rien, que des journées tristes. Horizons en parpaing. Bords d’autoroutes. Soulignent un bruit de canette. Sans oiseaux. Ou ce seront des reliquats d’oiseaux, avec juste les plumes et la vermine de ceux qui sont en route sans savoir où aller.
Qui sont en route sans savoir où aller.
Les plus jeunes jeunes ne sont pas en reste, voici un poème grappillé dans le livre de Rascal qui a merveilleusement illustré les visages des poètes choisis dans le si juste titre « Les poètes ont toujours raison » (est-il disponible ?)
L’écolier
J’écrirai le jeudi j’écrirai le dimanche
quand je n’irai pas à l’école
j’écrirai des nouvelles j’écrirai des romans
et même des paraboles
je parlerai de mon village je parlerai de mes parents
de mes aïeux de mes aïeules
je décrirai les prés je décrirai les champs
les broutilles et les bestioles
puis je voyagerai j’irai jusqu’en Iran
au Tibet ou bien au Népal
et ce qui est beaucoup plus intéressant
du côté de Sirius ou d’Algol
où tout me paraîtra tellement étonnant
que revenu dans mon école
je mettrai l’orthographe mélancoliquement
Raymond Queneau